mercredi 1 février 2012

Histoire et risques climatiques !

Emmanuel Garnier, Les dérangements du Temps – 500 ans de chaud et de froid en Europe, Plon, 2010, 246 pages.


Maître de conférences habilité d’histoire moderne et membre du centre de Recherche d’histoire quantitative de l’université de Caen, Emmanuel Garnier a repris en France le flambeau de l’histoire du climat lancée brillamment, il y a une quarantaine d’années, par Emmanuel Leroy-Ladurie. La différence, c’est qu’entretemps ce domaine est devenu un enjeu majeur du fait notamment du débat sur le réchauffement climatique. Les données recueillies par les spécialistes des sciences dures sont en effet très discutées. Les historiens sont donc fortement encouragés à donner une profondeur nouvelle aux recherches, quitte parfois à remettre en cause la perception que nous avons des évènements contemporains. Emmanuel Garnier et Emmanuel Leroy-Ladurie ont ainsi été amenés à relativiser fortement le caractère exceptionnel des tempêtes subies par la France depuis une quinzaine d’années. L’historien, et ce n’est pas sans poser problème, devient donc un expert du « risque climatique pour les pouvoirs publics. Emmanuel Garnier collabore donc à plusieurs programmes nationaux voire internationaux sur le sujet. Dans le présent ouvrage, qui résume ses travaux, il réduit par exemple l’impact macabre du Grand Hiver 1709 mais il réévalue fortement les conséquences de l’éruption du volcan islandais Laki en 1783. Celui-ci n’aurait peut-être pas causé la Révolution Française mais il serait à l’origine de plusieurs dizaines de milliers de morts en Angleterre et en France. Le fait pouvant se reproduire, l’Académie nationale de Médecine a donc demandé à l’auteur de venir lui présenter ses conclusions lors de sa séance du 10 mai 2011. La difficulté pour l’historien est d’entrer de manière sereine dans des domaines qui, de toute façon, feront polémique. Jean-Marc Moriceau en a fait dernièrement l’expérience dans sa vaste enquête sur le loup, les pros et les anti-loups l’accusant mutuellement d’être dans le camp d’en face. Or, les données rassemblées depuis vingt ans par les historiens tendent à confirmer l’existence de cycles chauds et froids qui ont alterné depuis l’an Mil. Plusieurs réchauffements comme celui que nous vivons depuis la fin du XXe siècle ont été remarqués dans le passé (Leroy-Ladurie (E.), Rousseau (D.), Vasak (A.), Les fluctuations du climat. De l’An mil à aujourd’hui, Fayard, 2011). Toute la difficulté est donc de séparer sereinement ce qui relève du temps long et ce qui relève du temps court dans l’élévation actuelle des températures.

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